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Alix, 32 ans

 

Extra Vaillants : Alix, peux-tu nous parler de toi ?

Alix : Je ne sais pas parler de moi, je n’y arrive pas bien.

 

Extra Vaillants : Qu’est-ce que les personnes qui te connaissent bien pourraient dire de toi ?

Alix : Je suis gentille, volontaire. J’ai le sens de l’effort. Je suis altruiste, peut être trop. J’aime aider les gens, c’est plus fort que moi, mais certaines fois ils ne le comprennent pas, mon handicap est invisible. Alors ça peut devenir dangereux pour moi.

 

Extra Vaillants : Qu’aimes-tu faire ?

Alix : J’adore lire. J’ai lu « Harry Potter », « la Tresse », « Les Victorieuses », « S’adapter »… J’aime aller au musée, j’aime ce qui est culturel, le cinéma. J’aime aller aux parcs d’attraction mais pas trop sur les manèges en hauteur, j’ai le vertige. J’aime aller à la piscine là où j’ai pieds, je n’aime pas mettre la tête sous l’eau. J’adore voyager. Je suis allée deux fois à New York. J’ai adoré ces immenses buildings, les petites touches jaunes partout que sont les taxis. J’ai pris le bateau, visité des musées et vu une comédie musicale : Mary Poppins, elle est passée sur un fil juste au-dessus de nos têtes ! Je suis allée à Londres, à Malte, en Espagne…

 

Extra Vaillants : Habites-tu toujours chez tes parents ?

Alix : Oui mais j’attends une réponse pour un habitat inclusif partagé fin de ce mois. Si la réponse est positive je pourrai y emménager en avril/mai prochain. C’est un projet piloté par une association. Il s’agit d’une communauté de trois maisonnées. Dans chaque maison il y a 6 personnes porteuses de handicap et 4 accompagnateurs. Chacun a son studio mais on prend nos repas ensemble, il y a des activités y compris ouvertes sur l’extérieur. Les personnes handicapées peuvent être sans emploi, travailler dans le bénévolat, travailler en ESAT ou en milieu ordinaire.

 

Extra Vaillants : Qu’est-ce que cela représente ce projet pour toi ?

Alix : Pouvoir faire comme mon frère et mes deux sœurs, être autonome, voler de mes propres ailes. Je ne reste pas loin de mes parents, entre dix et vingt minutes de voiture. Ça me va bien.

Mes parents sont heureux. Ils font partis du projet d’habitat inclusif.

 

Extra Vaillants : Que fais-tu actuellement ?

Alix : Je suis contente j’ai débuté un stage dans une cafétéria gérée par des personnes porteuses de handicap et des éducateurs. A terme le projet de l’association est d’ouvrir un restaurant inclusif sur le modèle des « cafés joyeux ».

 

Extra-Vaillants : Peut-on revenir sur ton parcours ? Comment étais-tu petite ?

Alix : On m’a dit que je faisais beaucoup de bêtises et qu’il fallait avoir un œil sur moi tout le temps. Un jour j’ai enfermé maman dans le garage (rires). Je faisais des colères c’était plus fort que moi. J’ai parlé tard, je crois que ma première phrase était vers 4 ans. J’ai marché vers l’âge de deux ans, avant j’avais beaucoup de mal à cause d’un gros déséquilibre, je préférais aller partout à quatre pattes c’était plus simple ! Je suçais mon pouce et ça a duré longtemps ! Jusqu’à mes dix ans je crois, jusqu’à ce que je porte un appareil dentaire. Je mangeais vite et c’est toujours le cas !

Le plus difficile pour moi était les jeux sportifs, tout ce qui touchait à la motricité, le bricolage, les légos, les puzzles, les activités manuelles.

J’aimais beaucoup les jeux de société (le Qui est-ce ? le Uno), les playmobils. Je pratiquais la danse.

L’école a été un calvaire. Je n’étais pas aidée, pas soutenue. On ne me comprenait pas sauf ma maitresse de CM2. On me faisait écrire malgré ma dyspraxie. Comme je réussissais dans certains domaines ou parfois dans un domaine où j’avais des difficultés, on me disait « quand elle veut, elle peut ». Je n’ai jamais eu d’AVS.

Maman m’a toujours aidée. Je n’ai jamais pu faire mes devoirs seule.

C’était difficile parfois de voir les autres avec leurs facilités, aller jouer alors que moi je devais faire des rééducations ou que j’étais privée de récréation parce que je devais finir de copier…

J’ai été suivie en CMPP de l’âge de 4 ans à l’âge de 16 ans : remédiation cognitive, psychologue, psychomotricité, orthophonie principalement en logico-mathématiques.

Malgré tout, je suis fière j’ai eu mon brevet technologique, un BEPA de service à la personne en maison familiale et rurale, un CAP petite enfance et un Diplôme d’État d’Auxiliaire de Vie Sociale.

J’ai toujours été bonne dans la théorie, plus en français qu’en mathématiques.

Par contre la pratique c’est compliqué.

 

Extra Vaillants : Peux-tu nous expliquer tes difficultés ?

Alix : J’ai travaillé auprès de personnes âgées et d’enfants. J’avais du mal à prendre des initiatives, à faire certains gestes de soin, à suivre un rythme rapide, à traiter l’information et à la réaliser rapidement. Il y a trop de choses à faire en même temps. J’ai dû arrêter mon travail.

C’est comme pour le permis, j’ai eu le code du 1er coup mais jamais la conduite, même avec une automatique. Il y a trop de gestes, d’observation, d’attention en même temps. C’est une TESLA qu’il me faut (rires).

Après j’ai trouvé un poste grâce à une mission locale dans une école maternelle. C’était compliqué pour moi,  la directrice l’a vu mais elle m’a aidée. Elle a fait les démarches avec moi pour réviser ma situation à la MDPH, refaire des bilans et obtenir le statut de Travailleur Handicapé.

 J’avais déjà 25 ans à ce moment-là. J’ai même fait de la menuiserie en CPO (Centre de pré-orientation de la MDPH) lors de la demande de RQTH (Reconnaissance de la qualité de Travailleur handicapé ), et AAH (Allocation Adulte Handicapé)  afin de savoir si je devais être orienté vers le milieu ordinaire ou en ESAT (Établissement et Services Aide par le Travail).

Aujourd’hui j’ai une reconnaissance de mon handicap à hauteur de 80%.

 

Extra Vaillants : C'est lors de ces derniers bilans, examens que tu as reçu le diagnostic du syndrome MYT1L  ?

Alix : Je ne me retrouvais pas assez dans les troubles d'apprentissages, et le TDA, je sentais qu'il y avait autre chose, du coup je me suis dit que c'était peut-être génétique et j'ai demandé à ma psychiatre une lettre pour aller en centre de génétique. J’avais 29 ans et j'ai eu les résultats en 2020 donc j'avais 31 ans, presque 31 ans car le résultat était en juin et je suis d'octobre.

 

 

Extra Vaillants : Quelles sont tes victoires Alix ?

Alix : Je suis fière de tous mes diplômes, de tous mes efforts. Ce n’est pas la même époque, je n’avais pas d’aide.

Je suis fière de faire mes lacets (rires).

Je suis fière d’avoir témoigné devant 300 personnes dans le cadre d’une association, et je suis à l’aise.

Je suis fière d’avoir pris l’avion seule, sans aucune assistance, à deux reprises pour aller à New-York et à Londres. Je me suis même débrouillée en anglais avec les douanes.

 

Extra Vaillants : Es-tu heureuse Alix ?

Alix : Quand je regarde mon parcours, je me dis que la vie est belle, que ça aurait pu être plus difficile encore. Mon hypersensibilité me donne plus d’empathie que les autres et ça me rend heureuse. Tout le monde a des difficultés, personne n’arrive à faire tout ce qu’il veut. Je peux faire plein de choses, même si ce n’est pas toujours facile. C’est plus long, ça prend du temps mais il faut garder espoir, on peut y arriver. Je suis aussi hypersensible aux bruits et aux odeurs : je pourrais être « nez » ! Quand ça sent bon c’est formidable mais sinon… je suis contente parfois d’avoir un masque finalement (rires).

Le regard des autres ça ne me fait plus rien, avant ça me faisait du mal. Maintenant ça glisse sur moi comme l’eau sur les plumes d’un canard (rires).

 

Extra Vaillants : Comment vois-tu l’avenir ?

Alix : Dans ma maison avec un travail, une activité c’est sûr !

Je suis suivie par un médecin physique et de réadaptation, je vais peut-être reprendre l’orthophonie pour travailler la mémoire auditive. J’aimerais faire de l’équithérapie : monter à cheval ou faire de l’attelage.

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Janvier 2022

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